Vous avez dit décroissance ?
C’est bien de cela dont il s’est agi ce mercredi soir 3 mai 2023 à l’Espace Landry. Invité par l’association Ensemble Pour L’Ouverture, Monsieur Daniel Schöni, qui se présente lui-même comme un économiste « décalé », a provoqué le débat avec un thème volontairement provocateur « Croissance perpétuelle : un conte de fées ? »
Comment en effet concilier l’idée sur laquelle est basée tout notre système économique actuel, à savoir qu’il ne peut s’épanouir que dans une croissance continue, avec le constat que les ressources planétaires sont limitées et que les effets délétères de la croissance sont négligés ? Comment imaginer que le produit intérieur brut (PIB) sensé mesurer notre « richesse » ne tienne aucun compte des diminutions et des pertes, de ressources naturelles, de la qualité de vie, des terres propices à l’agriculture, des habitats naturels nécessaires à la biodiversité ou des réserves d’eau potable ? Comment se fier à une comptabilité qui additionne les recettes et ignore les charges ?
Ces questions sans réponse satisfaisante ont conduit l’orateur du jour à se trouver un peu en porte-à-faux avec ses connaissances d’économiste. Ce « décalage » assumé l’a amené à réfléchir à une autre économie, à abandonner le « toujours plus » qui nous gouverne actuellement pour aller vers le « toujours mieux ». Excellent vulgarisateur, il a su par des exemples concrets et sans le moindre chiffre faire comprendre à son auditoire des notions parfois peu intuitives ou très abstraites.
Il serait toutefois présomptueux de penser qu’il est facile de changer de direction, tant l’inertie du navire économique est grande, tant le nombre d’implications d’un changement de cap est important. Pourtant, un autre modèle économique semble atteignable… et viable : réduire l’importance du profit, recentrer les activités sur la qualité de vie, réfléchir en termes d’amélioration plutôt que de maximisation du rendement, et beaucoup d’autres possibilités de changer d’objectif. On peut renoncer à la croissance continue, sans effondrement économique, sans tomber dans la récession, sans même réduire son niveau de confort.
Les pistes sont nombreuses et certaines actions sont déjà à notre portée comme l’a montré le débat, fort animé, et les questions tout à fait pertinentes de l’assistance. On a discuté de développement technologique, d’énergies renouvelables, de culture extensive, de faux besoins artificiellement créés, de l’omniprésence de la publicité et de quantité d’autres choses passionnantes. On a aussi pris conscience que le consommateur a le pouvoir et que son mode de consommation peut dévier le paquebot sur lequel nous sommes tous embarqués avant qu’il ne percute le mur vers lequel il se dirige actuellement.
En résumé, ce fut une soirée intéressante, enrichissante et motivante. Merci donc à Monsieur Schöni et à Ensemble Pour L’Ouverture pour cette… ouverture.
André Besançon
